Tuesday, November 18, 2008

“Yes we can”, dit le Moyen-Orient à Obama

Amman – A travers le Moyen-Orient, les dirigeants politiques ont félicité Barack Obama de sa victoire électorale historique à la fonction de 44e président des Etats-Unis. Pour de nombreux observateurs, son nouveau gouvernement allait introduire une politique nouvelle, une démarche nouvelle qui apporterait la paix à une région plongée dans les turbulences les plus graves pendant les huit années de la présidence de George W. Bush.

Certains dirigeants arabes traditionnellement alignés sur Washington ont célébré la victoire d’Obama, tout comme ils auraient célébré celle du candidat républicain si John McCain avait gagné.

Mais au niveau de l’opinion publique, c’est un sentiment de soulagement, certes teinté de circonspection, qui a prévalu: pendant les quatre années à venir, la Maison Blanche sera habitée par un président afro-américain qui s’est présenté, au cours d’une campagne de 22 mois comme un partisan de la paix et du dialogue et bien décidé à résoudre les conflits.

Dans son discours de victoire, Obama a donné de nombreux gages aux optimistes qui espèrent qu’il portera un regard plus favorable sur le reste du monde et même peut-être sur les causes arabes.

Depuis quelques mois, ces partisans d’Obama sont l’objet de critiques de la part des têtes pensantes arabes qui, sceptiques, sont persuadées qu’Obama ne changera pas la politique bien enracinée des Etats-Unis en faveur d’Israël.

Mais Israël a su prononcer les mots qui rassurent: “A tous ceux qui nous regardent ce soir au-delà de nos frontières, de leurs palais et de leurs parlements, à tous ceux qui se pressent autour d’un transistor dans les coins les plus reculés de la planète, je dis ceci: nos histoires sont singulières, mais nos destins sont partagés.

Une nouvelle aube de leadership américain se lève aujourd’hui.”

Dans toute la région, les gens étaient collés à leurs postes depuis les petites heures du matin. Les chaînes de télévision arabes populaires ont couvert l’événement en direct depuis l’ouverture du scrutin jusqu’à ce que les deux candidats prononcent leurs discours, l’un de concession, l’autre de victoire.

Les grincheux affirment que le succès sans précédent de cette consultation est dû aux désastres incommensurables que George W. Bush et son gouvernement ont causés par leur prétendue ”guerre contre la terreur” et en contraignant les alliés arabes des Etats-Unis à se soumettre à leur politique militariste impopulaire.

Dans leurs messages de félicitation à Obama, certains responsables arabes exprimaient leur espoir de voir le président-élu démocrate s’atteler dans un esprit positif à la recherche d’une solution pacifique au conflit israélo-palestinien.

Le Président égyptien Hosni Moubarak a déclaré: “Nous attendons de vous une participation constructive à la solution de la question de la Palestine et à la réalisation d’une paix juste et totale, préalable indispensable à la sécurité et à la stabilisé au Proche-Orient.”

Le Président palestinien Mahmoud Abbas, qui ne parvient pas à conclure ses négociations de paix avec Israël depuis que Bush les a relancées à Annapolis voici un an, a repris presque mot pour mot les propos de M. Moubarak, exprimant son espoir que le nouveau président “accélèrera les efforts pour parvenir à la paix, surtout parce que de la résolution du conflit arabo-israélien dépend la paix mondiale”.

De son côté, Israël semble assuré qu’une administration Obama ne va pas changer la politique américaine, que rien ne sera fait pour pousser l’état juif à faire la paix avec les Palestiniens en mettant un terme à ses activités de colonisation, en éliminant les contrôles routiers et, au bout du compte, en se retirant de la Cisjordanie.

Le Premier ministre israélien sortant, Ehud Olmert, a déclaré qu’il s’attend à un renforcement des rapports entre son pays et les Etats-Unis, en raison des “liens spéciaux” qui unissent les deux Etats.

Hamas, le mouvement politique islamique palestinien qui gouverne la bande de Gaza et qui figure sur la liste des “terroristes” recherchés par les Etats-Unis, a déclaré qu’il souhaite qu’Obama “tire les leçons des erreurs commises par les administrations précédentes, à commencer par celles de Bush, qui ont détruit l’Afghanistan, l’Irak, le Liban et la Palestine”, selon les termes de Fawzi Barhoum, porte-parole du mouvement.

Pour sa part, le gouvernement irakien dit n’attendre du gouvernement Israël aucun changement d’orientation qui se traduirait par un retrait rapide des 140.000 militaires et plus présents dans le pays depuis l’invasion conduite par les Etats-Unis en 2003 et à laquelle le président-élu s’était opposé dès le départ.

En Irak toujours, les “sadristes”, ces partisans anti-américains du religieux chiite Moqtada Sadr, voient dans la victoire d’Obama “le désir du peuple américain de voir son armée se retirer d’Irak”, conformément aux exigences exprimées depuis toujours par ce mouvement.

Les milieux politiques iraniens eux aussi ont favorablement réagi à l’élection d’Obama, déclarant que sa victoire sur M. McCain et la conséquence de la faillite et des défaites de la politique étrangère de M. Bush.

Ils souhaitent que le nouveau gouvernement tire les leçons des erreurs commises par le précédent.

Au niveau officiel, Téhéran joue la montre, attendant de voir si la politique étrangère de M. Obama se démarquera de l’attitude hostile du gouvernement Bush à l’égard de l’Iran.

Les dépêches de Téhéran prédisent toutefois avec un optimisme prudent que Barack Obama tiendra sa promesse d’un dialogue avec l’Iran pour sortir du bras de fer nucléaire avec l’Occident, voire pour rétablir les liens qui avaient été coupés depuis la révolution islamique de 1979.

Quant à la Syrie, qui figure sur la liste noire de Bush en tant que “courtier du terrorisme”, elle espère que le nouveau venu saura “remplacer la politique de guerre et de blocus des Etats-Unis par la diplomatie et le dialogue”, selon les propos de Mohsen Bilal, ministre de l’information.

En Afghanistan, enfin, le Président Hamid Karzaï a invité les nouveaux dirigeants de Washington à changer de stratégie dans leur prétendue “guerre contre la terreur”, affirmant qu’elle n’a pas sa place dans les villages afghans…mais qu’elle doit être dirigée contre les nids et centres de formation de terroristes”.

M. Karzaï adjure Barack Obama de mettre fin aux pertes civiles dans ce pays où 70.000 soldats de l’Otan s’efforcent en vain de réduire à merci les Talibans et l’insurrection armée.

Source: Middle East Times, 5 novembre 2008, www.metimes.com